Compétition

Entretien avec Gastão Fráguas, Champion du Monde CIK-FIA 1995

Le nom de Gastão Fráguas est entré dans l’histoire du karting international lors d‘une saison 1995 absolument remarquable. Jeune Brésilien exilé en Belgique, il a su saisir sa chance qui se présentait à lui et il a réussi l’exploit de remporter le Championnat du Monde CIK-FIA à Valence (FRA). Toujours passionné par le sport automobile, […]


Entretien avec Gastão Fráguas, Champion du Monde CIK-FIA 1995

Le nom de Gastão Fráguas est entré dans l’histoire du karting international lors d‘une saison 1995 absolument remarquable. Jeune Brésilien exilé en Belgique, il a su saisir sa chance qui se présentait à lui et il a réussi l’exploit de remporter le Championnat du Monde CIK-FIA à Valence (FRA). Toujours passionné par le sport automobile, il a ensuite opéré une belle reconversion dans le management de pilotes, ce qui lui permet de faire profiter les jeunes de son expérience en les amenant notamment en Europe pour affronter les meilleurs spécialistes.

Gastão, pouvez-vous commencer par retracer vos débuts en karting ?

J’ai commencé assez tardivement, j’avais 15 ans, après avoir découvert le karting grâce à un cousin. Il s’est avéré que j’avais un bon coup de volant et je suis lancé avec une certaine réussite dans la compétition. Dès l’année suivante, en 1993, j’ai tenté ma chance en Europe lors du Championnat du Monde CIK-FIA de Laval (FRA) en catégorie Formule A. J’étais assez rapide, mais je manquais cruellement d’expérience. À la suite d’un tonneau consécutif à une rupture de frein dans une manche, je n’ai pas pu atteindre la finale. En 1994, j’ai davantage roulé au Brésil où j’ai croisé la route de Roland Maréchal lors d’une épreuve du Championnat Sudam. Les performances des châssis Tony Kart de son équipe m’ont impressionné. Le contact est bien passé et nous avons trouvé un accord pour que je prenne part au Championnat du Monde qui se déroulait en Argentine, à Cordoba. Encore une fois, j’avais une bonne vitesse et j’ai pu terminer 15e en finale.

Comment avez-vous abordé la saison 1995 ?

J’étais décidé à franchir une grande étape. J’ai accepté la proposition de Roland Maréchal de venir habiter en Belgique. Ce fut un dépaysement important loin de mes proches, mais le bilan a été très positif. J’ai pu m’entraîner dans plusieurs courses du Championnat de Belgique et du Championnat d’Italie, toujours en Formule A. Le Championnat d’Europe CIK-FIA a bien démarré avec une 2e place à Lonato (ITA) et j’ai pu terminé vice-Champion derrière Giorgio Pantano après une nouvelle seconde place à Salbris (FRA). Entre temps, j’étais monté sur la 3e marche du podium de la Coupe du Monde CIK-FIA à Suzuka (JPN). Je croyais dans mes chances pour le Championnat du Monde CIK-FIA qui avait lieu à Valence (FRA). Tout s’est en effet bien passé et j’ai décroché le titre devant Jenson Button. Ce fut vraiment une saison extraordinaire au sommet du karting international et je n’ai pas regretté d’avoir fait le sacrifice de m’établir en Europe.

Que s’est-il passé à la suite de votre titre mondial ?

Je suis passé en Formule Super A l’année suivante, mais une fracture de la clavicule a compromis ma saison. Je suis resté loin des pistes pendant deux mois et je n’étais pas prêt pour le Championnat du Monde à Lonato. En 1997, je suis entré dans l’équipe de Terry Fullerton aux côtés  d’Anthony Davidson. Ce fut intéressant sur le plan du développement du matériel, mais compliqué en termes de résultats. C’est alors que je me suis progressivement tourné vers la monoplace.

Quel bilan faites-vous de votre carrière de pilote ?

J’ai roulé en Formule Renault en 98-99, puis en Formule 3 au Brésil en 2000 avant de raccrocher mon casque en 2001. Je me suis rendu compte après coup que j’avais manqué d’une gestion professionnelle de ma carrière. Je n’ai pas été en mesure de profiter des résultats que j’avais eus en karting. Des portes se sont ouvertes, mais je n’ai peut-être pas effectué les bons choix. Je repensais à Jenson Button qui avait fini vice-Champion du Monde en 95 derrière moi : il avait un plan de carrière bien structuré qui lui a permis de poursuivre avec succès en sport auto. C’est cela qui m’a donné envie de passer de l’autre côté de la barrière et de m’occuper de jeunes pilotes pour leur permettre de développer leur talent et de provoquer les opportunités. J’ai ainsi lancé mon activité de management dès 2002.

Quels pilotes avez-vous suivis ?

Avant même de me lancer dans le management, j’avais conseillé à mon ami Ruben Carrapatoso de venir rouler en Europe et j’ai établi la connexion avec Roland Maréchal. Je suis fier d’avoir contribué à la conquête par un Brésilien d’un nouveau titre de Champion du Monde de karting en 1998. Plus près de nous, je me suis occupé de Caio Collet dès 2014 et l’ai encouragé à venir courir en Europe. C’est ainsi qu’il a eu sa place en 2015 dans le team officiel Kosmic, dirigé par Olivier Maréchal, pour continuer la belle histoire que j’avais commencée avec son père. Caio a tout de suite signé une formidable 2e place lors de la première épreuve du Championnat d’Europe CIK-FIA Junior à Portimao, pour finir 6e du classement. Il est ensuite rentré dans le top 3 du Championnat du Monde CIK-FIA Junior en tant que meilleur rookie.

Comment se porte le karting au Brésil ?

À mon époque, le karting brésilien avait un niveau élevé et j’ai pu me former suffisamment pour être compétitif dès mon arrivée en Europe. Mais nous n’avons pas continué à évoluer par la suite, pour plusieurs raisons, tandis que l’Europe progressait sans cesse. L’écart est maintenant beaucoup plus important et c’est difficile pour un pilote brésilien qui sort directement de son pays. Il y a toujours de bons pilotes au Brésil, mais moins qu’avant parce que le niveau de compétition est moins élevé. Il est aujourd’hui indispensable de venir se former en Europe dans les grandes courses internationales, même si cela n’est pas bon marché.

L’organisation d’un Championnat du Monde au Brésil est un évènement très important pour notre pays et nous sommes reconnaissants à Felipe Massa d’en être l’instigateur. Cela n’aura pas lieu comme prévu en 2020 à cause du COVID-19. Nous comptons beaucoup sur cette épreuve désormais programmée en 2021 pour relancer la compétition au Brésil et redonner un élan populaire vers le karting. J’espère que la situation actuelle ne portera pas préjudice à cette belle initiative.

Interview FIA Karting / Photo © DR – Gastão Fráguas

 


Publié le 24/04/2020

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